„Forger un nouveau code"

Sir Joshua Reynolds et la question de l'ambiguïté

Jan Blanc

Au sein d’une publication où l’ambiguïté visuelle fait loi, cet article se propose d’évoquer un cas-limite des questions et des enjeux évoqués dans le cadre de ces actes de colloque en s’interrogeant non pas sur la question de la réversibilité des figures (Kippfiguren) mais sur la réversibilité des images – de leur structure, de leur signification et de leur effet sur le spectateur. À ce titre, de fait, il s’agira de réfléchir la notion même d’ambiguïté, dont les racines étymologiques et terminologiques, c’est le moins que l’on puisse dire, sont elles-mêmes fort ambiguës! [1]


En effet, ce terme, composé des segments ambi- et -agere, ne se laisse guère définir aisément. Le suffixe, -agere, désigne un mouvement: „pousser“, „marcher“, „aller de l’avant“. Le problème commence avec le préfixe: ambi-. En latin, il renvoie à ce qui penche „d’un côté comme de l’autre“, à droite comme à gauche, en haut comme en bas, à l’intérieur comme à l’extérieur, sans direction privilégiée, sans orientation naturelle. Ce préfixe, que l’on retrouve dans les mots ‚ambivalence‘ ou ‚ambidextrie‘, trouve un exact équivalent dans le grec amphi-, dont il partage sans doute les racines sanskrites [2], et que l’on utilise dans des termes comme ‚amphibologie‘ ou ‚amphigouri‘. Dans l’ensemble de ce champ lexical, c’est la possibilité en même temps que l’impossibilité d’un mouvement qui s’exprime. C’est un mouvement toujours potentiel, sans cesse entravé, un choix envisageable mais aussi impossible.


Comment, donc, dans un tel contexte, penser l’ambiguïté? Le critique anglais Samuel Johnson n’avait pas tort, au XVIIIe siècle, de définir, dans son Dictionary of the English Language (1755), l’ambiguïté (ambiguity) comme un „doute“ ou une „incertitude de signification“ (doubtfulness of meaning, uncertainty of signification), ou encore comme un „double sens“ (double meaning).[3] À l’incertitude d’une notion s’ajoute l’incertitude d’une interprétation. L’ambiguïté d’un signe dévoile la fragilité de sa perception, dans la mesure où il n’est guère possible de séparer la perception d’une image de la culture visuelle, des habitudes et des réflexes qui informent et rendent possible cette perception, l’inscrivant dans un cercle logique. Est-ce par le doute que le signe paraît ambigu? Ou est-ce l’ambiguïté du signe qui nous fait douter? Est-ce l’incrédulité qui rend le témoignage douteux? Ou est-ce l’impossibilité apparente du témoignage qui nous enlève toute possibilité de certitude? À ces questions, nous pourrions en ajouter une dernière puisque, dans sa définition, Samuel Johnson laisse supposer que l’ambiguïté relève du „double sens“ (double meaning). De quel ordre donc cette duplicité relève-t-elle? S’agit-il d’une duplicité temporaire, destinée à être levée par l’interprétation? Ou s’agit d’une duplicité permanente, inhérente à la qualité même du signe ambigu? S’agit-il, en d’autres termes, d’une logique du sous-entendre ou d’une logique du double-entendre? S’agit-il de dire quelque chose sous le voile de l’ambigu? Ou s’agit-il de dire deux choses à la fois?


Nous pouvons bien sûr poser ces enjeux de différentes façons. Cet article se proposera de considérer la question de l’ambiguïté en l’éclairant grâce à un artiste qui en a fait non seulement un objet privilégié de ses tableaux, mais qui l’a progressivement conçu comme un outil essentiel de sa pratique: le peintre anglais sir Joshua Reynolds. La tâche que je me donnerai ne sera pas de donner du sens à ce qui n’en a pas – à mettre de l’univocité là où règne l’équivoque – mais de rendre à l’ambiguïté sa ou ses fonctions, dans un système à la fois artistique, esthétique et idéologique, dont elle constitue la véritable pierre angulaire. En cela, il n’est pas contradictoire de penser que toute ambiguïté est indécidable, sans pour autant renoncer à décider d’être ambigu.

 

Thaïs vs. The Night Mare


Avril 1781. Comme c’est le cas, chaque année, depuis 1769 et la première exposition organisée par la Royal Academy, les visiteurs affluent, par milliers, dans l’étroit escalier en colimaçon qui mène aux salles d’exposition de la Somerset House. Cette année, la critique juge pourtant l’événement décevant. Les vedettes habituelles (Angelica Kauffman, Thomas Gainsborough, Benjamin West) ne livrent pas leurs meilleures œuvres. L’exposition se réduit surtout à un duel entre deux peintres, à la fois amis et rivaux: le président de la Royal Academy, sir Joshua Reynolds, et son collègue, Henry Fuseli. À eux deux, ils ne présentent pas moins de dix-neuf tableaux. Fuseli soumet une Vision de Catherine d’Aragon, d’après Shakespeare, aujourd’hui connue par une estampe [4], une Mort de Didon (ill. 1), d’après Virgile, une Conversation, tableau aujourd’hui perdu, et une œuvre sur le titre de laquelle je reviendrai un peu plus tard. Reynolds, de son côté, présente quinze tableaux. Parmi eux – essentiellement des portraits –, on reconnaît le visage du musicologue Charles Burney [5], de la comtesse de Salisbury [6] et des sœurs Waldegrave, peintes pour leur oncle, Horace Walpole.[7] Quatre autres tableaux de Reynolds sont également présentés: une Mort de Didon (ill. 2), lui aussi, deux tableaux peints comme modelli pour les vitraux de la New College Chapel, à Oxford (la Tempérance et le Courage), ainsi qu’un dernier tableau, que le catalogue présente sous le titre laconique de Thaïs (ill. 3).

Ce dernier tableau fait sensation. Son sujet, tiré de l’histoire grecque, est bien connu;[8] et il est probable que, pour son traitement, Reynolds se soit inspiré d’un poème de John Dryden, Alexander’s Feast; or the Power of Musique. An Ode in Honour of Cecilia’s Day (1697), mis en musique dans un oratorio par Haendel (1736), et plus particulièrement du passage suivant: 

 

Thaïs lui [à Alexandre] montra le chemin,
L’éclairant [de son flambeau] vers sa proie;
Et le roi se saisit d’un flambeau, avec une envie de destruction.[9]
Et, comme une autre Hélène, mit le feu à une autre Troie.
Les princes applaudirent d’une joie furieuse;

En 330 avant Jésus-Christ, au terme d’un banquet bien arrosé, la dénommée Thaïs demande à son amant, Alexandre le Grand, d’incendier la ville de Persépolis, en signe et en témoignage du feu de leur passion commune: une parfaite illustration de la force parfois destructrice de la passion et du désir, qui ont d’ailleurs fait entrer le nom de Thaïs dans le langage ordinaire, devenu, dans l’anglais du XVIIIe siècle, un synonyme de ,courtisane‘ ou de ,prostituée‘. Tous les spectateurs de l’exposition de 1781 se posent d’ailleurs une question: le titre donné par Reynolds à son tableau, Thaïs, est-il un nom propre ou un qualificatif? S’agit-il de la représentation de Thaïs, la courtisane d’Alexandre, ou d’une ,thaïs‘, d’une courtisane? Certains spectateurs croient reconnaître les traits d’une certaine Emily Warren (dite aussi Emily Bertie, Emily Coventry ou Emily Pott), connue en son temps pour sa beauté mais aussi pour ses liaisons adultérines avec plusieurs hommes de la bonne société londonienne (Robert Pott, Richard Greville). D’autres spectateurs, dont certains critiques, soupçonnent même Reynolds d’avoir peint un tableau satirique.[10] Ayant commencé à exécuter le portrait d’Emily Warren, avant de découvrir que celle-ci n’avait pas assez d’argent pour le payer, le peintre aurait choisi de se venger de ce paiement insatisfait en exposant et en moquant aux yeux de tous les mœurs légères de la jeune femme.


Sur le plan historique, cette interprétation est probablement fausse.[11] Tout porte à croire, en effet, que ladite Emily Warren a posé pour un portrait historié, dans le rôle de Thaïs, à la demande de l’un de ses amants, Charles Greville. Mais en intitulant son tableau Thaïs, et en jouant de l’ambivalence d’un mot pouvant être à la fois un nom propre et un nom commun, il est clair que Reynolds a souhaité conserver à son œuvre toute son ambiguïté. S’agit-il de la Thaïs ou d’une ‚thaïs‘? De la maîtresse d’Alexandre ou d’Emily Warren? D’un tableau d’histoire ou d’un portrait? D’une louange à la beauté féminine ou d’une raillerie morale? Rien, dans le tableau comme dans le catalogue de l’exposition, ne permet de trancher. Le tableau de Reynolds est double. Plus qu’un tableau-à-clef – comme on pourrait parler d’un roman-à-clef, à la manière de ceux de Madeleine de Scudéry ou de Fénelon –, il est untableau sans clef ou, si l’on veut, un tableau à plusieurs clefs, chacune d’entre elles ouvrant une serrure et une signification différente.

La Thaïs de Reynolds n’est d’ailleurs pas le seul tableau foncièrement ambigu de l’exposition de 1781. Non loin de lui est accroché un tableau de Fuseli, qui suscite tout autant d’interrogations. Dans le catalogue distribué aux visiteurs, cette œuvre présentée sous le titre de The Night Mare (ill. 4). En anglais, mare signifie „jument“. Au sens métaphorique et argotique, mare peut aussi renvoyer à une femme ou un homme efféminé. En ancien anglais, le nightmare (en un mot) peut désigner un esprit ou un monstre, généralement féminin, qui s’assoit sur la poitrine des dormeurs afin de les étouffer. Mais il peut également renvoyer à l’impression de suffocation que l’on ressent parfois pendant ou après un mauvais rêve. Et il renvoie encore au cauchemar, au sens moderne du terme.

Que désigne donc le tableau de Fuseli? Le night(-)mare est-il le cauchemar vécu par la jeune femme allongée? Le petit monstre assis sur sa poitrine? La ‚jument de la nuit‘, dans les ténèbres de l’arrière-plan? La jeune femme elle-même, qui, peut-être, d’ailleurs, n’est pas une femme? Ou le tableau, dans sa totalité, qui serait, pour ainsi dire, le cauchemar du spectateur? Quand on retourne le tableau, on découvre le portrait d’une jeune femme, dont les vêtements sont proches de la figure allongée peinte par Fuseli. La tradition l’a identifiée à Anna Landolt, nièce de Lavater, dont Fuseli était amoureux en Suisse, mais qui lui avait été refusée par son père, avant le départ du peintre, de Zürich à Londres, deux ans avant la présentation de son tableau à la Royal Academy. Le Night Mare serait-il donc celui du désir refoulé? De la séparation? Ou encore le tableau lui-même, dont Fuseli aurait rêvé en pensant à son amour perdu?

 

Reynolds et Fuseli refusent de clore leur tableau respectif sur lui-même. Le titre que Fuseli donne à son œuvre, dans le catalogue, séparant volontairement les mots night et mare, empêche toute interprétation univoque. De même, le mot seul de ‚Thaïs‘, sans la mention de ‚portrait‘ ou de ‚peinture d’histoire‘, ne permet pas de se faire une opinion sur l’intention de l’artiste. Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit de parasiter la reconnaissance du sujet et l’identification du genre, d’enrichir plus que de réduire l’ambiguïté de l’œuvre.

 


„Sketches of Characters“


Cette exposition concomitante de deux tableaux particulièrement ambigus est-elle due au hasard? Afin de répondre à cette question, il est nécessaire de s’interroger encore un instant sur les ressorts précis de cette duplicité.


Lorsqu’il meurt, le 23 février 1792, sir Joshua Reynolds laisse derrière lui près de 2000 feuilles manuscrites, soigneusement conservées dans son atelier – et dont une grande partie, aujourd’hui, est inédite. Dans ces feuilles, nous retrouvons, pêle-mêle, des brouillons pour quinze discours à la Royal Academy, mais aussi des notes sur les arts, des projets d’articles sur les belles-lettres ou le théâtre. Parmi ces projets figure un essai sur William Shakespeare, où Reynolds analyse notamment, à la suite des observations de Samuel Johnson, la manière très particulière dont Shakespeare façonne les personnages de ses pièces. „Shakespeare“, explique Reynolds dans une note aujourd’hui conservée à Yale, „a donné ce que l’on pourrait appeler des esquisses de personnages (sketches of Characters), qui échappent à la représentation ou à la lecture superficielle. Il souhaitait introduire tant de variété qu’il n’[…] avait pas le temps de […] finir ses personnages ou, tout du moins, pas [tous]“.[12] Citant les exemples de Jaques, dans As You Like It, du fou, dans King Lear, ou d’Ophélie, dans Hamlet, Reynolds fait de Shakespeare le parangon de l’ambiguïté volontaire, laquelle, selon lui, répond à deux objectifs. Le premier est le souci de variété: Shakespeare, souligne-t-il, „souhaitait introduire tant de variété qu’il n’avait pas le temps de finir aucun de ses personnages ou, tout du moins, pas [tous]. Jaques en est un exemple“. Reynolds fait ici allusion au fameux personnage mélancolique de Jaques, dans As You Like It, auquel Shakespeare fait dire sa fameuse phrase: „All the world’s a stage“.[13] À l’image de Jaques, tantôt voué à des pensées mélancoliques, tantôt intéressé par le progrès moral du genre humain, les personnages du théâtre de Shakespeare sont volontairement ambigus:


Et ici, par ailleurs, on trouve un exemple de ce respect que Shakespeare avait pour son public, en supposant que ce dernier formerait sa propre opinion et ne se contenterait pas de l’opinion qu’un autre personnage donne de lui dans la pièce, mais qu’il se formerait une opinion à partir d’une représentation générale du caractère/personnage. Jaques n’est pas un homme mélancolique, mais semble avoir été excessivement dégoûté de la société par les coqs et les prétentieux, lesquels sont chéris pour leur audace et mènent la société.

Ce passage traduit bien le rapport que Reynolds entretient avec l’enjeu de l’ambiguïté, présenté à la fois comme un problème et comme une solution. Un problème, dans la mesure où, chez Shakespeare, le personnage de Jaques apparaît contradictoire, mobile, insaisissable pour un public ‚vulgaire‘, c’est-à-dire habitué à des rôles bien charpentés, souvent fondés sur des caractères stéréotypés – le ‚Mélancolique‘. Mais aussi une solution, puisque, par ce malentendu, savamment construit par Shakespeare, le spectateur de la pièce est amené à y participer activement, reconstruisant par lui-même la psychologie réelle des personnages. Ce que le théâtre perd en clarté et en lisibilité, il le gagne en profondeur et en intensité, puisqu’aucune œuvre d’art n’est mieux appréciée que lorsqu’elle interpelle un public qui contribue à sa construction. En jouant des quiproquos et en laissant ses personnages inaboutis, Shakespeare laisse libre le public de les achever. 

Ce petit détour élisabéthain permet de montrer à quel point la question de l’ambiguïté est pensée par Reynolds, d’abord dans le théâtre, puis dans les arts. En effet, à la fin de son huitième discours académique, prononcé trois ans avant la fameuse exposition de 1781, Reynolds revient sur la question:

 

Il est vrai que les esquisses, ou les dessins que les peintres font ordinairement de leurs ouvrages, donnent à un haut degré ce plaisir de l’imagination. Dans ces esquisses légères et indéterminées, où les idées de la composition et des caractères ne sont, pour ainsi dire, que touchées, l’imagination ajoute plus que le peintre probablement n’aurait pu produire.

Et quelques lignes plus loin:


Ces idées générales, qui s’expriment dans les esquisses, ressemblent parfaitement aux moyens dont on se sert en poésie. Une grande partie de la beauté de la célèbre description d’Ève, dans le Paradis Perdu de Milton, consiste dans l’emploi d’expressions générales et indistinctes, dont chaque lecteur tire le détail à la convenance de son imagination particulière – et selon ses propres idées de la beauté, de la grâce, de l’expression, de la noblesse et de l’élégance.[14]

Pour Reynolds, l’esquisse – ici étudiée en son sens littéral, mais prise, chez Shakespeare, en son sens figuré – offre un avantage paradoxal: elle n’achève pas son objet, ce qui lui permet d’en tirer la substance essentielle. En cela, ne pas finir ne signifie pas ne pas achever, ce qui est ambigu n’est pas toujours ce qui n’a pas de sens. Bien au contraire: ne pas finir un tableau est la meilleure façon de l’achever, en le réduisant à l’essence de sa forme – à ce que Reynolds appelle ailleurs sa „forme centrale“[15], une forme centrale expurgée de ses accidents et de ses détails inutiles.


Cette „forme centrale“ de l’œuvre d’art n’est pas une forme ,idéalisée‘. C’est même le contraire: idéaliser une figure revient à faire ce que le peintre James Barry avait proposé, près de quinze ans auparavant, dans un tableau dérivé d’un passage de Paradise Lost: tirer la forme du côté d’une idée déterminéea priori de la beauté féminine (ill. 5). Au contraire, pour Reynolds, comme pour Fuseli, c’est en se refusant de privilégier une stricte détermination plutôt qu’une autre que l’esquisse conserve à la forme une structure ouverte et disponible à l’interprétation. Un tableau esquissé, ou dont les figures ne sont pas formellement déterminées, se substitue à la nature elle-même, à la natura naturans, à cette nature perpétuellement inachevée, à la Création continuée qui ne cesse de produire ses propres objets et ses propres créatures, sans qu’il soit possible de les figer dans une forme ou une réalité quelconque.

 

 

Une ambiguïté interactive


Du théâtre, revenons-en, à présent, à la peinture et, à plus proprement parler, au onzième discours que sir Joshua Reynolds prononce, en 1782, à la Royal Academy – soit un an tout juste après que la Thaïs et le Night Mare ont été exposés par l’institution:


Ceux qui n’ont que peu de commerce avec les œuvres d’art sont souvent étonnés du haut prix que les connaisseurs attachent à des dessins d’apparence négligée et inachevés d’aucune façon; ils ont pourtant une véritable valeur; et cette valeur vient de ce qu’ils donnent l’idée d’un ensemble; et que cet ensemble est souvent exprimé avec une adroite facilité, où se révèle le vrai talent d’un maître, même grossièrement exercé: soit qu’il s’agisse de la composition en général, soit de la forme générale de chaque figure, soit de l’attitude de ces figures, laquelle donne la grâce et l’élégance. Nous voyons tout cela merveilleusement illustré par les dessins du Parmesan et du Corrège. Quelque valeur que l’on accorde à ces dessins, ce ne sera jamais celui de leur grand fini, ni d’une attention minutieuse aux détails.[16]

Ici, Reynolds s’attaque directement à l’approche servilement mimétique de peintres comme John Singleton Copley et Benjamin West, tentant de montrer que cette approche est doublement vaine. Vaine, d’abord, au sens large du terme. Comme le dit Clément Rosset au sujet de la photographie, „si tout bouge il est impossible de rien attraper, ou plutôt impossible de rien saisir tel quel, de rien saisir sans le changer“.[17] Imiter le réel suppose nécessairement de le transformer. Le réalisme n’existe pas. Mais, surtout, cette pratique illusionniste est contreproductive. En s’attachant aux détails des objets, elle émiette la représentation; elle fait papilloter le coloris; elle détruit l’unité et l’effet du tout-ensemble; elle empêche l’œuvre d’appeler le spectateur et de le faire entrer en elle. Mais elle détermine aussi le contenu et la forme, constituant le rapport à l’œuvre non sur le mode d’un dialogue mais d’un monologue. En refusant l’ambiguïté de son objet, un tableau ne constitue pas une „République de l’œil“, selon l’heureuse expression récemment employée par Pascal Griener[18], mais une dictature du regard, une mise au pas de la perception artistique. Une œuvre, une forme, un spectateur.


Selon Reynolds, pour qu’un tableau plaise et fasse de l’effet, il doit, au contraire, plaire universellement et sans concept. Un spectateur cultivé, qui connaîtrait et comparerait la Thaïs de Reynolds à la Cérès de Ludovico Carracci, que le peintre anglais a vue et dessinée au Palazzo Sampieri, à Bologne, et dont il s’est directement inspiré pour son tableau, goûterait certainement les allusions mais aussi les écarts entre le modèle et sa reformulation, tout comme il pourrait aimer retrouver le tableau de Reynolds dans la Lady Macbeth que Fuseli présente, trois ans plus tard. Une telle perception savante serait également possible si ce même connaisseur parvenait à relier la Mort de Didon de Reynolds et celle du Guerchin, que l’Anglais avait admirée et commentée lors de sa visite du Palazzo Spada, à Rome. Mais cette culture visuelle n’est, au fond, en aucun cas nécessaire à la compréhension formelle de ces œuvres. Le fait que Reynolds et Fuseli aient choisi, probablement de façon délibérée, d’exposer des œuvres qui, au sein du même espace d’exposition, se commentent et se parasitent les unes les autres, leur permet certes de se mesurer mutuellement, aux yeux des spectateurs et à la barbe de leurs collègues. Mais dans cette entreprise, Fuseli est un allié en même temps qu’un rival de Reynolds. Au sein d’une vaste et complexe machine intericonique, dont chaque tableau peut être considéré comme un fragment, la valeur et le sens de chacune de ces œuvres réside moins, en somme, dans son contenu propre que dans ses rapports formels et expressifs aux autres toiles. Par ces jeux de motifs interchangeables, tournés et inversés, agrandis et réduits, l’ambiguïté est foncièrement renforcée. La Mort de Didon ou le Night Mare de Fuseli réactive les potentialités plastiques possibles contenues dans les tableaux de Reynolds. L’épée ensanglantée, très clairement visible dans la Mort de Didon de Fuseli permet, par comparaison, de s’interroger sur la manière, beaucoup plus elliptique, dont Reynolds rend compte de ce détail pathétique. A contrario, la posture que Reynolds donne à la figure de Didon conduit à se demander si la femme représentée dans le Night Mare est une dormeuse ou un cadavre. Dans cette conception ouverte de la perception, où l’ambiguïté fait loi, Reynolds et Fuseli tentent donc, ensemble, d’établir un nouveau rapport à l’œuvre, essentiellement fondé sur l’interaction et sur l’appel à l’activité imaginaire.

 


Une ambiguïté potentielle


Avant de conclure, j’aimerais analyser un tableau qui, à bien des égards, synthétise et résume ces enjeux liés à l’ambiguïté visuelle. L’histoire de ce tableau est longue et complexe; toutefois, j’aimerais la retracer rapidement, car elle permet précisément de comprendre le fonctionnement et la portée de cette œuvre.


À la demande de Catherine II de Russie, Reynolds commence, au début de l’année 1786, l’exécution d’un Hercule enfant étranglant les serpents dans son berceau, d’après un texte de Pindare (ill. 6).[19] Le 12 et le 19 février de la même année, le peintre fait poser un petit garçon, dans son atelier. Entre les mois d’avril et de juin, il commence à peindre son tableau. Un journaliste déclare avoir vu „un chaos de couleurs, mais si l’on en parle comme d’une esquisse, il a certainement les marques du génie susceptibles d’en faire l’éloge“. Le 28 septembre, Edmond Malone voit le tableau à son tour, parlant d’une œuvre „vaguement esquissé[e], mais [qui] promet beaucoup“. Entre octobre et décembre, Reynolds décide d’insérer des figures allégoriques. En mars 1787, le tableau n’a pas avancé. Le 11 avril, le Morning Herald parle d’„une œuvre complète, comportant treize figures“, mais „si loin d’être achevée que nous doutons qu’elle puisse orner l’Académie lors de la prochaine exposition“. En juin, Reynolds reprend l’exécution de son Hercule, après l’avoir abandonnée pendant plusieurs mois. Le peintre semble décidé à reprendre tout à zéro. La presse s’intéresse alors de plus en plus aux difficultés rencontrées par Reynolds. Le 3 juillet, le World écrit que


Sir Joshua Reynolds travaille dur sur sa grande production pour l’impératrice de Russie. Le sujet du tableau est le même, mais il le traite différemment de ce qu’il avait proposé, il y a encore quelque temps. En effet, tout ce qui, ces derniers mois, était apparu à la surface de sa toile a été effacé; et l’histoire est à nouveau racontée depuis le début (the story is told anew).

(George Crabbe, un fréquent visiteur de l’atelier de Reynolds, à cette époque, explique qu’il aurait vu quatre versions différentes de l’Hercule sur la même toile. Après avoir achevé son tableau, Reynolds aurait déclaré que la version finale cachait „dix peintures en-dessous, certaines meilleures, certaines pires“.) Le 23 août, le même journal évoque un tableau „presque achevé – et dans une semaine ou une quinzaine, il sera probablement exposé aux regards de tous“. Cela semble être le cas, puisque le tableau est accroché dans la galerie de l’atelier de Reynolds, au mois de septembre. Mais les premières réactions sont négatives. Le 6 septembre, tandis que Reynolds est absent, Horace Walpole visite son atelier en catimini et ironise:


Je ne l’ai pas du tout admiré: l’enfant principal m’a rappelé ce que j’avais lu si souvent, sans jamais en avoir vu – un monstre difforme: les genoux du petit Hercule sont aussi gros, je peux bien l’imaginer, que ceux de feu lady Guildford. L’aveugle Tirésias regarde avec horreur ce spectacle.

Ces critiques ne sont sans doute pas étrangères au nouveau retard pris par Reynolds, qui décide de retravailler son œuvre. Le 5 octobre, le World précise qu’il „ne reste maintenant plus à cette merveilleuse production qu’à mettre la dernière main et à finir les couleurs“. Le 24 octobre, pourtant, le Timesconstate que „Sir Joshua commence à faire des avancées considérables vers l’achèvement de son œuvre“. Et le 21 novembre, le World explique encore que „la grande œuvre que Sir Joshua a peinte pour l’impératrice de Russie a été sensiblement améliorée par les changements effectués dernièrement“. Le 24 décembre, le World précise que „la Tsarine n’aura sans doute pas son tableau de l’Enfant Hercule avant le printemps“. Le 26 mars 1788, Reynolds „amende et retouche“ toujours son tableau, selon le World, et „est en train de donner les dernières touches“. Le tableau est finalement présenté lors de l’exposition de la Royal Academy, entre avril et mai 1788, soit plus de deux ans après avoir été commencé.


En m’appesantissant ici sur l’histoire détaillée d’un tableau qui ressemble assez à celle du Chef d’œuvre inconnu de Balzac, c’est pour souligner les conditions dans lesquelles l’Hercule a été présenté à la Royal Academy. Pour tous ses spectateurs, qui étaient tous des lecteurs des journaux londoniens, l’Hercule, avant d’être une œuvre d’art, était le résultat, le produit d’un lent, long et laborieux processus de genèse. Chacun avait suivi, presque au jour le jour, l’histoire d’un tableau impossible à accoucher. On connaissait toutes les étapes par lesquelles Reynolds était passé. Au fond, son tableau valait moins pour lui-même que pour les efforts qu’il avait exigés et toutes les couches de peinture qu’il avait demandées.


Si le résultat a pu surprendre et décevoir beaucoup de spectateurs, le tableau est devenu, très vite, l’exemple même du ‚chef-d’œuvre‘, dans la mesure où il avait été possible à toutes et tous de saisir les difficultés rencontrées et surmontées par le peintre. En cela, l’Hercule est, lui aussi, un modèle d’ambiguïté. Il apparaît comme le palimpseste de toutes ses versions antérieures, mais encore de tous les récits que les journalistes et les critiques avaient consacrés à son élaboration. Il montre, par
l’exemple, qu’un chef-d’œuvre est toujours ambigu; qu’un chef-d’œuvre est toujours inachevé, dans la mesure où il reste porteur des manques et des apories que le peintre y voit, des alternatives qu’il y a imaginées et qu’il n’a pas mises en œuvre. L’œuvre présentée ainsi au public n’est donc plus un objet digne de respect en raison de son unicité, où chaque élément serait absolument nécessaire, et où la version finale serait la ‚bonne‘. Elle serait, au contraire, un chef-d’œuvre à la condition de n’être que la dernière étape d’une genèse interrompue.

Construite dans la douleur, de bric et de broc, par des arrêts et des reprises, des hésitations et des remords, l’Hercule a été mis en pièces avant même d’avoir été assemblé. Décrit dans le Public Advertiser du 19 mai 1788 comme „une extraordinaire et curieuse présentation d’exercices de postures et de démonstrations de force“, l’Hercule est un puzzle de formes, une collection de motifs, qui auraient pu être peints autrement, et qui ne sont issus que d’un choix contingent, temporaire, fait parmi d’autres. De ce fait, et c’est un progrès considérable dans la pratique reynoldsienne de l’ambiguïté, qui peut évoquer ce que Turner mettra en place une vingtaine d’années plus tard, le tableau de Reynolds relève de ce que l’on pourrait appeler une logique de l’ambiguïté potentielle. Le tableau n’est pas seulement ce qu’il est; il est aussi ce qu’il a été, et (ce qui est plus fort encore) ce qu’il aurait pu être. Un journaliste du World résume bien cette idée: „Bien qu’il ait été récemment amendé, par un tout nouvel arrangement du groupe féminin, ce tableau peut tout autant faire l’objet de blâmes que de louanges“ (15 mai 1788). L’Hercule enfant exposé par Reynolds ne contient pas seulement les choix qui l’ont déterminé, mais encore l’abandon de tous les autres tableaux possibles, dont il porte partiellement la trace.[20] L’ambiguïté y produit une infinité de possibles, c’est-à-dire une infinité de perceptions, c’est-à-dire une infinité de plaisirs. 

 

Non-entendre


L’ambiguïté ne se fonde donc, chez Reynolds ou Fuseli, ni sur un double-entendre, ni sur un sous-entendre, mais sur ce que l’on pourrait appeler un non-entendre. Dans la Thaïs, le Night Mare, l’Hercule, le tableau, en lui-même, ne veut rien dire et ne rien expliquer. Son titre est un mot-valise, son sujet un faux ami, sa forme est un entortillage. Aucun sens caché, aucune énigme ne semble pouvoir s’y dévoiler, pas plus qu’une polysémie réductible à des messages, même confus.

 

Réduire ces œuvres à de simples jeux formels serait toutefois excessif – même s’il ne serait pas complètement absurde d’inscrire ces tableaux dans une sorte de préhistoire de l’art abstrait, proche de celle écrite par Otto Stelzer.[21] J’ai souhaité insister sur la manière dont Reynolds inscrit cette approche de l’ambiguïté dans sa théorie générale de la forme, de la perception et de l’œuvre d’art. Cette pratique est en grande partie fondée contre les idées de Benjamin West, qui était le principal concurrent de Reynolds en Angleterre, mais aussi le peintre dont le président de la Royal Academy était le plus éloigné sur le plan des idées. Reynolds accuse les tableaux d’histoire de West, caractérisés par des compositions traditionnelles, une représentation strictement mimétique de la nature et des sujets modernes ou contemporains, d’être les responsables de l’instauration d’une véritable révolution conservatrice dans les arts, renouant avec la précision méticuleuse de l’enfance de l’art, alors que la peinture anglaise était parvenue, grâce à Rubens, Van Dyck, Lely, Kneller ou Ramsay, à atteindre un niveau technique supérieur, fondé sur le refus du fini et un goût pour une touche esquissée.

 
Face à cette réaction assimilée à un conservatisme, Reynolds prône la nécessité d’une réforme plutôt qu’une révolution, dont il détaille les enjeux, dans son septième discours académique: 

 

Celui qui voudrait réformer une nation où le mauvais goût prévaudrait n’atteindra pas son but en allant droit contre le courant des préjugés. Il faut que l’esprit des hommes soit préparé à recevoir ce qui est nouveau pour lui. La réforme est une question de temps. Un goût national, quelque mauvais qu’il soit, ne peut être changé tout d’un coup; il faut céder un peu à la prévention qui s’est emparée de l’esprit, et grâce à cette précaution, on peut espérer amener les gens à des idées qui les auraient d’abord choqués, si on avait cherché à les introduire par la violence.[22]

Dans ce projet de réforme du goût anglais, qui vise à „forger un nouveau code“, selon l’expression utilisée par Joshua Reynolds au sujet de la nouveauté des pièces de William Shakespeare[23], en s’écartant d’une conception excessivement déterminée et close de la beauté artistique, la mise en valeur de l’ambiguïté, de l’esquisse, du refus de la forme propre, du sujet clairement identifiable et d’une hiérarchisation verticale du rapport de l’œuvre à son spectateur, constituait assurément, pour Reynolds, le moyen le plus efficace de convertir ses spectateurs à ses idées – contre leur gré, sans doute, mais surtout à leur insu. 

 


Bibliographie

Athénée (1680): Les Quinze livres des Déipnosophistes. Trad. Jacques Langlois. Paris: Jacques Langlois.

 

Charles, Michel (1995): Introduction à l’étude des textes. Paris: Éditions du Seuil.

 

Cicéron (1998): L’Amitié. Trad. Robert Combès. Paris: Les Belles Lettres. 

 

Cowley, Abraham (1806): Works. 2 vol. Londres: George Kearsley. 

 

Dante (2010): La Divine Comédie. Trad. Lucienne Portier. Paris: Éditions du Cerf.

 

Diodore de Sicile (1865): Bibliothèque historique. Trad. Ferdinand Hoefer. 4 vol. Paris: Hachette.

 

Dryden, John (1697): Alexander’s feast, or The power of musique an ode, in honour of St. Cecilia’s day. Londres: Jacob Tonson.

 

Griener, Pascal (2010): La République de l’œil: l’expérience de l’art au siècle des Lumières. Paris: Odile Jacob.

 

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Mannings, David/Postle, Martin, éd. (2000): Sir Joshua Reynolds: A Complete Catalogue of his Paintings. 2 vol. New Haven: Yale UP.

 

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Northcote, James (1818): Memoirs of Sir Joshua Reynolds. Londres: Henry Colburn.

 

Postle, Martin (1995): Sir Joshua Reynolds: The Subject Pictures. Cambridge: Cambridge UP.

 

Rey, Alain (1998): Dictionnaire historique de la langue française. 3 vol. Paris: Dictionnaires Le Robert.


Reynolds, Joshua (1761): „A Letter on Painting, First Published in the Weekly Paper Called The Idler“. In: London Chronicle, 12–14 mai 1761.

 

Reynolds, Joshua (1959): Discourses on Art. Éd. Robert R. Wark. New Haven: Yale UP.

 

Richardson, Jonathan (1725): An Essay on the Theory of Painting. Londres: Arthur Bettesworth.

 

Richardson, Jonathan (1734): Explanatory Notes and Remarks on Milton’s „Paradise Lost“. Londres: James John & Paul Knapton.

 

Rosset, Clément (2005): Fantasmagories. Le réel, l’imaginaire et l’illusoire. Paris: Éditions de Minuit. 

 

Schiff, Gert (1973): Johann Heinrich Füssli: 1741–1825. 2 vol. Zürich: Berichthaus.

 

Shakespeare, William (2010): As You Like It. Éd. Jonathan Bate. Basingstoke: MacMillan.

 

Stelzer, Otto (2010): La Préhistoire de l’art abstrait: préludes et modèles de pensées. Trad. Jean Torrent. Paris: Maison des Sciences de l’Homme.

 

Térence (1979): L’Eunuque. Trad. René Waltz. Paris: Les Belles Lettres.


Notes de bas de page

1 Rey (1998), vol. 1, 104-105.

2 Rey (1998), vol. 1, 121-122.

3 Johnson (1755), article „Ambiguity“. Il parle également d’„ambilogie“ (ambilogy) pour qualifier une „discussion de signification ambiguë ou douteuse“, et d’„ambiloquie“ (ambiloquy), pour évoquer „l’usage d’expressions douteuses et indéterminées“.

4 Schiff (1973) présente deux fragments d’un tableau, aujourd’hui conservés au Victoria and Albert Museum, qui permettent d’évaluer les dimensions du tableau original (environ 320 x 230 cm).

5 Voir Mannings/Postle (2000), cat. 290.

6 Voir Mannings/Postle (2000), cat. 339.

7 Voir Mannings/Postle (2000), cat. 1810.

8 Voir Diodore de Sicile (1865), XVII, 72. Voir aussi Térence (1979), Cicéron (1998), Athénée (1680), et encore Dante (2010), Enfer, XVIII, v. 133-136 et Marlowe (2005). Sur ce tableau et les commentaires qu’il a suscités, que je cite ici, voir Postle (1995), 212-222.

9 „Thais led the way, / To light him to his prey; / And like another Helen, fir’d another Troy. / The princes applaud with a furious joy; / And the king seiz’d a flambeau, with zeal to destroy“. Dryden (1697), 7.

10 Voir Mannings/Postle (2000), vol. 1, 566.

11 Voir Mannings/Postle (2000), vol. 1, 567.

12 New Haven, Yale University Library, James Boswell Collection, boîte 30, dossier 767, feuillet 2372, fol. 9.

13  Shakespeare (2010), II, 7, v. 139-166.

14  Reynolds (1959), 163-164. Voir Milton (2007), IV, v. 304 et suivants. Sur ce passage, voir aussi Richardson (1725), 242-243; Richardson (1734), 154-159.

15  Reynolds (1761).

16  Reynolds (1959), 198.

17  Rosset (2005), 45.

18  Griener (2010).

19  Selon son ami Ozias Humphry, Reynolds se serait inspiré, pour ce tableau, de la première Ode Néméenne de Pindare, récemment traduite par Gilbert West. Rien ne permet, toutefois, d’affirmer que le peintre ne se soit pas appuyé sur la traduction, plus ancienne et canonique, d’Abraham Cowley. Voir Pindarick Odes (1669) dans Cowley (1806), vol. 2, 131-136. Selon l’ancien élève du peintre, James Northcote, ce sujet spécifique aurait été choisi par Reynolds afin d’évoquer les difficultés rencontrées par l’impératrice de Russie afin de civiliser son pays barbare, allégoriquement comparé au jeune Hercule qui, dès le berceau, doit faire preuve de sa bravoure. Voir Northcote (1818), vol. 2, 215. 

20  Charles (1995), 361-367. 

21  Stelzer (2010).

22  Reynolds (1959), 140-141.

23  New Haven, Yale University Library, James Boswell Collection, boîte 30, dossier 767, feuillet 2372, fol. 24.



01Blanc FUSELI Mort Didon
Ill. 1: Henry Fuseli: La Mort de Didon (1781). Huile sur toile, 244,3 x 183,4 cm. New Haven, Yale Center for British Art, Paul Mellon Collection.
02Blanc
Ill. 2: Sir Joshua Reynolds: La Mort de Didon (1781). Huile sur toile, 142,2 x 251 cm. Collections de la Reine d’Angleterre.
03Blanc Thais
Ill. 3: Sir Joshua Reynolds: Thaïs (1781). Huile sur toile, 229,3 x 144,8 cm. Waddesdon Manor (Buckinghamshire).
04Blanc Fuseli cauchemare
Ill. 4: Henry Fuseli: The Night Mare (1781). Huile sur toile, 101,6 x 126,7 cm. Detroit Institute of Art.
05BlancBarry AdamEve
Ill. 5: James Barry: La Tentation d’Adam (1767–1770). Huile sur toile, 233 x 186 cm. Dublin, National Gallery of Ireland.
06bisBlancReynolds2
Ill. 6: Sir Joshua Reynolds: Hercule étranglant les serpents dans le berceau (v. 1786–1788). Huile sur toile, 303 x 297 cm. Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage.